L’inexplicable et coupable négligence des autorités face aux millions de cigarettes électroniques jetables illégales sur le marché suisse

La Confédération n’agit pas pour que les lois soient respectées.

Une loi est censée être respectée et mise en application ; en cas de non-conformité, il est attendu que les autorités agissent avec des mesures répressives adéquates. Cependant, en matière de tabagisme, spécialement pour les cigarettes électroniques, cette attente se transforme en une illusion. Depuis leur irruption sur le marché, une quantité alarmante de cigarettes électroniques jetables, mieux connues sous le nom de "puff bars", contenant des quantités gigantesques de sels de nicotine, inondent illégalement les marchés suisse et européen. En Suisse, ce fléau connaît une croissance exponentielle et totalement anarchique, en raison de la totale inertie des autorités publiques. Des millions de ces dispositifs jetables, violant ouvertement les normes en vigueur, sont aisément accessibles sur le marché, permettant aux jeunes de les obtenir en un simple clic, sans le moindre contrôle. Malgré une parfaite connaissance de cette débâcle, la Confédération demeure dans une inaction flagrante.

La situation juridique

D’après la loi en vigueur, aucune cigarette électronique dite à système fermé, en version pods (capsules) ou jetable, ne peut pas dépasser une limite de 2 millilitres de volume de e-liquide, ni une concentration de plus de 20 mg/ml de nicotine. Il s’agit là d’une norme établie par une Directive européenne de 2014 valable aussi en Suisse. Nous avons mis en évidence ce cadre juridique et amplement dénoncé la forte circulation de ces produits déjà en 2023.[i] La nouvelle Loi sur les produits du tabac (LPTab) ne va rien faire de plus que de reprendre ces limites telles quelles.

Un volume de 2 ml d'e-liquide indique qu'une cigarette électronique peut générer au maximum 800 bouffées. Par conséquent, tout produit revendiquant un nombre de bouffées supérieur à 800 nécessite obligatoirement un réservoir d'une capacité supérieure à 2 ml. Nous constatons une augmentation régulière tant du volume d'e-liquide que du nombre de bouffées offertes. À ce jour, nous estimons que plus de la moitié de toutes les cigarettes électroniques jetables disponibles sur le marché excèdent cette norme légale.

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Abbildung 1: Puff Turbo 16000 (30 ml) mit verschiedenen Aromen: https://www.wevappy.ch/cigarette-electronique/puff-jetable-e-cigarette-jetable/puff-turbo-16000-strawberry-coolplay-e-cigarette-jetable (französisch, eingesehen am 28.2.2024, Produkt gibt es Stand 16.07.2024 nicht mehr auf der Website).

Si les cigarettes électroniques jetables offrant 1 500 ou 2 500 bouffées sont couramment disponibles sur les sites de vente en ligne ou dans les boutiques, nous observons désormais des produits affichant même plus de 10 000 bouffées. Prenons pour exemple frappant cette tendance vers des nouveautés toujours plus puissantes et potentiellement plus dangereuses : la nouvelle « Puff Turbo 16000 Strawberry Coolplay - 16000 Bouffées – Jetable », proposée à 26,90 CHF sur le site wevappy.ch. Pour ce produit, le réservoir contient 30 millilitres de liquide, ce qui représente 15 fois la limite légale autorisée. À titre de comparaison, une Elfbar de 600 bouffées se vend habituellement autour de 8 CHF. Cela implique qu'il faudrait dépenser approximativement 214 CHF en Elfbar de 600 pour obtenir la même quantité de nicotine que celle fournie par une seule Puff Turbo 16000. L'avantage économique pour les jeunes de se tourner vers des produits plus concentrés est donc manifeste.

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Tableau 1 : Ce tableau présente un extrait des quelques produits du site internet Wevappy.ch par taille de réservoir. Sur WeVappy.ch sous la rubrique e-cigarettes sont listés 339 produits dont la majorité dépasse la norme légale de 2ml (site consulté le 28.02.2024). * La Elfbar 800 est en vente sur le site Vape.ch (site consulté le 28.02.2024)

Si un produit comme la Elfbar 800 est l’équivalent en nicotine de 60 cigarettes, d’après les déclarations même de l’entreprise Elfbar[ii], cela signifie qu’une cigarettes électronique jetable qui permet de produire 16'000 puffs serait l’équivalent de 1'200 cigarettes.

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Image 2 : comparaison entre une Elfbar 600 (légale) et une Coolplay Turbo 16000 (illégale) en équivalent en cigarettes et prix en vente sur le site WeVappy.ch (site consulté le 28.02.2024)

Big money derrière les cigarettes électroniques illégales

Il est crucial de saisir les dynamiques financières qui alimentent l'évolution de ce marché. Nous avons aussi procédé à des analyses sur les marges bénéficiaires des vendeurs. En s'approvisionnant directement en Chine auprès des usines responsables de la quasi-totalité de la production mondiale de ces articles, les commerçants évitent tout intermédiaire de distribution. Ainsi, ils peuvent réaliser des bénéfices nets de 80 à 90 %. Sur certains produits, il devient facile de dégager un profit d'environ 19'000 CHF pour 1'000 unités vendues. Nous évaluons que certains points de vente écoulent aisément 1'000 articles jetables par semaine. L'idée qu'une boutique spécialisée en puff puisse atteindre un bénéfice net proche du million de francs par an n'est pas du tout farfelue, surtout en considérant que cela concerne en grande partie des produits illégaux. Qu'en est-il alors des contrôles, y compris les contrôles fiscaux, ainsi que des amendes éventuelles ? Selon nos informations, ils sont inexistants.

Le problème des concentrations excessives de nicotine continue aussi

La même directive européenne de 2014 qui limite les volumes dans les cigarettes électroniques à système fermés, impose également une limite maximale de la concentration de nicotine dans les e-liquide, qui ne doit pas dépasser les 20 mg/ml (souvent exprimés sur les emballages de manière trompeuse avec le chiffre de « 2% »), dose considérée déjà comme étant forte. Dès mars 2022, AT Suisse avait alerté concernant la circulation sur le marché suisse de produits contenant des concentrations illégalement élevées de sels de nicotine, allant jusqu’à 60 mg/ml.[iii] Selon nos informations, quelques cantons ont réagi et ont contraint certains magasins à retirer ces produits de la vente. Cependant, ces articles sont toujours disponibles sur Internet ou dans des cantons qui n'ont procédé à aucun contrôle.

Sur le site puffbar.eu, il est toujours possible d'acheter sans difficulté des puffs contenant une concentration illégale de 50 mg/ml de nicotine et de les faire livrer en Suisse. De même, commander des cigarettes électroniques jetables directement sur des sites de vente en ligne chinois, sans restriction de volume ou de concentration de nicotine, et se les faire livrer à son domicile en Suisse est tout aussi aisé.

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Image 3 : produits à 50 mg/ml de nicotine en vente sur le site https://puffbar.eu/de/puff-flow/48-cool-mint.html (consulté le 28.02.2024)

La nouvelle Loi sur les produits du tabac (LPTab), loi faible et qui va entrer en vigueur avec des années de retard, va reprendre simplement ces normes européennes de 2014. Mais si aucun effort sérieux n’est entrepris déjà maintenant pour faire respecter les normes en vigueur, la LPTab ne va apporter aucune amélioration à la situation, comme pourtant la Confédération paraît faire semblant de croire.

L’ampleur du problème : des centaines de sites internet, mais Galaxus aussi !

Face à l’ampleur grandissante de ce phénomène et à l’inaction évidente des autorités fédérales, nous avons directement adressé à tous les chimistes cantonaux suisses une lettre au début du mois de mars 2024, afin de leur demander d’intervenir. Nous le faisons de manière très concrète afin d’aider ces autorités cantonales à effectuer leur travail en signalant les noms et adresses exactes des entreprises qui vendent ces produits, afin qu’elles puissent prendre les mesures nécessaires.

Nous avons conduit un contrôle des sites de vente en ligne qui proposent des cigarettes électroniques dépassant les limites légales de 2 millilitres de e-liquides. Presque tous les sites contrôlés en proposent. On aurait pu s’attendre à de petites entreprises marginales, mais c’est loin d’être le cas, car certains sites proposent des milliers de produits différents et parmi les surprises nous trouvons aussi Galaxus, le géant suisse de la vente en ligne, appartenant à la Migros, qui théoriquement prétend de ne pas vendre ni alcool ni cigarettes.

Sur le site de Galaxus, en sélectionnant le critère « disposable e-cigarettes » on obtient une liste de 348 articles, dont la grande majorité ont des réservoirs de plus de 2 ml et sont par conséquent vendus illégalement. Très fièrement, Galaxus a publié le 31 janvier 2024 une analyse de ses meilleures ventes 2023 : Our best-selling products of 2023.[iv] Parmi les tendances de consommation les plus importantes, Galaxus souligne que de plus en plus de gens achètent les cigarettes électroniques en ligne. Sous le titre très emblématique de « A cloud of vape smoke descends », Galaxus déclare « A societal trend reflected in the figures is the increasing popularity of vaping – the use of electronic cigarettes, advertised as an alternative to conventional tobacco. Last year, vapes and vape liquid shot up more than 500 places in the list of over 2,500 product groups available from Galaxus. Galaxus sold almost three times as many vapes in 2023 as in the previous year, despite the health risks of e-cigarettes. ». Plus loin ils précisent que l’augmentation de vente de ces produits a été de 291%, mais ils ne mentionnent nulle part que la majorité des produits vendus sont totalement illégaux.

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Figure 4 : exemples de quelques produits illégaux en vente sur le site Galaxus, des Elfbar 2'500 avec un réservoir de 8ml, ou bien une Wotofo Nexbar 10'000 avec un réservoir de 20 ml. (Site consulté le 28.02.2024)

Il est assez choquant de constater que Galaxus, qui appartient à la Migros, vend non seulement des produits contenant de la nicotine, chose qui va totalement à l’encontre de l’esprit de Gottlieb Duttweiler, fondateur de la Migros qui avait interdit la vente de tabac et d’alcool. Mais de surcroît vend une grande quantité de produits totalement illégaux. Nous demandons à Migros et à Galaxus de renoncer complétement à la vente de ces produits nuisibles et toxiques.

Nous demandons aux autorités cantonales d’intervenir urgemment afin que tous les produits illégaux soient retirés du marché immédiatement. De plus, nous demandons également que des amendes importantes soient établies à l’encontre de ces entreprises. Si d’une part nul n’est censé ignorer la loi, d’autre part ces entreprises sont des spécialistes de la vente de ces produits : elles savent parfaitement bien que des cigarettes électroniques avec un système fermé comprenant un réservoir dépassant les 2 ml sont illégales, autant en Suisse que dans l’ensemble de l’Union européenne.

Les responsables : Parlement et Confédération

La situation d’illégalité de ces produits est parfaitement connue par toutes les autorités, mais malgré cela leur vente, au vu et au su de tous ceux qui veulent bien ouvrir les yeux, ne fait qu’augmenter.

Une interpellation parlementaire a été déposée le 15 juin 2023 par Mme Laurence Fehlmann Rielle, conseillère nationale (PS/GE), qui est aussi la présidente d’AT Suisse. Le texte déposé par Mme Fehlmann Rielle soulève clairement le problème de la présence importante de produits illégaux sur le marché et posait des questions tout aussi claires.[v]

23.3879 Interpellation

Cigarettes électroniques jetables avec des volumes illégaux d'e-liquides vendues sur le marché suisse. Que va faire le Conseil fédéral?

Texte déposé:

On constate qu'actuellement il y a de nombreuses cigarettes électroniques jetables dont le volume de e-liquide dépasse largement les limites autorisées. Je prie donc le Conseil fédéral de répondre aux questions suivantes:

- Va-t-il intervenir afin de faire retirer immédiatement du marché tous les produits dépassant les volumes maximaux autorisés et poursuivre les contrevenants ?

- L’Office fédéral de la douane et de la sécurité des frontières mène-t-il des contrôles systématiques de la conformité des cigarettes électroniques importées, avant leur mise sur le marché, comme l’Office le fait sur mandat de Swissmedic pour l’importation de médicaments ?

- Quels sont les contrôles effectués sur les cigarettes électroniques jetables après leur mise sur le marché?

- Au vu du risque concret que représentent ces produits pour la santé et l’environnement, le Conseil fédéral n’est-il pas d’avis que l’intérêt publique serait mieux servi en interdisant les cigarettes électroniques jetables en Suisse ?

La réponse du Conseil fédéral à cette interpellation est lacunaire et totalement insatisfaisante. On peut même se poser la question de savoir si le Conseil fédéral prend vraiment aux sérieux les questions posées. Une analyse critique de la réponse du CF montre que celle-ci ne répond pas de manière exhaustive aux questions posées, bien qu'elle couvre certains aspects relatifs à la réglementation et au contrôle des cigarettes électroniques en Suisse.

  1. Retrait immédiat des produits non conformes et poursuite des contrevenants : La réponse ne mentionne pas spécifiquement si le Conseil fédéral va intervenir pour faire retirer du marché les produits dépassant les volumes maximaux autorisés ou pour poursuivre les contrevenants. Il se concentre principalement sur les réglementations à venir avec la loi fédérale sur les produits du tabac et les cigarettes électroniques (LPTab) et les normes actuelles selon le principe du Cassis de Dijon.
  2. Contrôles systématiques des importations par l'Office fédéral de la douane et de la sécurité des frontières : Bien que la réponse mentionne que l'autorité d'exécution compétente (chimiste cantonal) contrôle la conformité des cigarettes électroniques, le CF ne précise pas si des contrôles systématiques des importations sont effectués avant leur mise sur le marché, en comparaison avec les médicaments par Swissmedic.
  3. Contrôles après mise sur le marché : La réponse aborde cette question en indiquant que le chimiste cantonal effectue des contrôles de conformité et prélève des échantillons en fonction des risques. Cependant, le CF manque de détails sur la fréquence, l'étendue et les critères spécifiques de ces contrôles, laissant ainsi une grande ambiguïté quant à leur efficacité.
  4. Interdiction des cigarettes électroniques jetables : La réponse fait référence à des mesures prises pour limiter l'impact sur la santé et l'environnement, telles que l'interdiction de la vente aux mineurs, des restrictions publicitaires, et des mesures de recyclage. Le CF mentionne également la possibilité d'interdire les produits à usage unique sous certaines conditions. Toutefois, il ne prend pas une position claire sur l'interdiction totale des cigarettes électroniques jetables en Suisse.

En conclusion, bien que la réponse du CF apporte certaines informations sur les réglementations existantes et à venir concernant les cigarettes électroniques en Suisse, elle ne répond pas de manière directe et complète aux questions spécifiques posées dans l’interpellation, notamment concernant l'action immédiate contre les produits non conformes, les détails des contrôles systématiques à l'importation, et la position du Conseil fédéral sur l'interdiction des cigarettes électroniques jetables. Pourquoi le Conseil fédéral n’a-t-il pas répondu complétement aux questions qui lui avaient été posées ?

Un autre exemple d’inaction de la Confédération : les avertissements sur les boites de Snus

Le manque d’intervention des autorités publiques ne se limite pas uniquement à permettre un tsunami de cigarettes électroniques jetables sur le marché Suisse. Un autre exemple de retard et passivité est celui des messages de santé absents de certains produits du tabac, en particulier des boîtes de Snus.

Déjà en 2021, AT Suisse a signalé l’absence de message de santé sur les emballages des Snus, d’abord dans une lettre à la Confédération au mois d’août 2021, ensuite par une publication sur notre site internet. Ces emballages violent ouvertement l’art. 15 al. 1 de l’Ordonnace fédéral sur le Tabac (OTab).[vi]

Comme pour la circulation de cigarettes électroniques illégales, Mme Fehlmann Rielle avait déposé une interpellation parlementaire le 17 mars 2022.[vii] Dans sa réponse le Conseil fédéral avait déclaré : « Le 5 novembre 2021, l'Office fédéral de la santé publique (OFSP) a informé les autorités cantonales d'exécution que du snus contenant du tabac et ne remplissant pas les exigences légales relatives à l'étiquetage était commercialisé en Suisse. À la suite de cette observation, certains cantons ont soumis à des contrôles les entreprises établies sur leur territoire ainsi que leurs produits. » et ensuite que « Fin mars 2022, l'OFSP a effectué une analyse de marché en sa qualité d'autorité de surveillance et a constaté que la mise en garde sur les emballages de snus figurait toujours à l'arrière du paquet plutôt qu'à l'avant. C'est pourquoi l'OFSP a attiré l'attention des cantons sur cette pratique qui demeure non-conforme. » Donc on renvoie encore et toujours la responsabilité aux Cantons.

Résultat des courses, dans tous les magasins de Suisse, que ce soit à la Coop, dans les kiosques ou sur internet les emballages de Snus sont librement en vente sans aucun des avertissements de santé prévus par la loi. Nous ne connaissons pas un seul emballage de Snus qui aurait adopté les messages d’avertissements conformément à la loi.

Face au fait que rien ne changeait dans les magasins de vente des Snus, Mme Fehlmann Rielle a été obligée de déposer une nouvelle interpellation en décembre 2023, à laquelle le Conseil fédéral a donné une réponse en février 2024, pour le moins insatisfaisante.[viii] En effet, le CF déclare, du fait de l’arrivée de la nouvelle LPTab qui prévoit des légers changements dans les avertissements de santé qu’« il n’est pour le moment pas impératif que l’OFSP édicte une directive à l’attention des cantons concernant cette adaptation d’étiquetage, sachant que le problème a déjà été porté à leur connaissance et qu’ils commencent maintenant leur travail. » et qu’ensuite les producteurs bénéficieront encore d’un délai transitoire pour adapter les emballages jusqu’en été 2025. Alors que le problème a été dénoncé par AT Suisse en août 2021, les autorités estiment donc aujourd’hui qu’il est... urgent d’attendre !

Non ! Pour AT Suisse ce manque total de respect de la loi en vigueur n’est pas acceptable et attendre n’est pas acceptable non plus.

Responsabilités politiques à tous les niveaux

Le principal responsable de la gabegie des cigarettes électroniques est le Parlement, où les partis de droite sous l’influence directe du lobby de la grande industrie du tabac freinent toute mesure efficace de lutte contre le tabagisme depuis toujours. Rappelons que le PLR et l’UDC ont reçu des financements directs de la part de Philip Morris International pour leur campagne lors des élections fédérales d’octobre 2023[ix], que le président de Swiss Tobacco siège au Parlement dans les rangs de l’UDC[x], et que le conseiller aux Etats Damian Müller (PLR/LU) et président de la Commission de la santé estime devant les caméras de l’émission Temps présent de la RTS qu’il y a autour de 300 morts par an causés par le tabagisme alors que ce chiffre est près des 10'000 : mensonge ou incompétence de la part d’un politicien qui, siégeant à la Commission de la santé et rapporteur de la majorité, devrait parfaitement informer des enjeux du tabagisme ?[xi]

Les retards de l’adoption d’une loi efficace contre le tabac et la lutte acharnée que le lobby du tabac est en train de mener contre la mise en œuvre de l’initiative parlementaire Enfants sans tabac[xii] est la preuve éclatante de la puissance néfaste et toxique de ce lobby.

D’autre part le Conseil fédéral néglige totalement la lutte contre le tabagisme. Pourquoi l’administration ne voit pas l’explosion de la vente de ces produits illégaux que nous mettons en évidence ? Car aucun système de surveillance du marché n’est en place ! Cela s’inscrit aussi dans le cadre général d’invisibilité totale du tabac dans les stratégies de santé publique adoptées depuis quelques années. Mis à part quelques jolies déclarations d’intentions, il y a de quoi se poser sérieusement la question : le tabagisme préoccupe-t-il vraiment la Confédération ?

Et les Cantons dans tout cela ? Comme l’indique la réponse du CF à l’interpellation de Mme Fehlmann Rielle, ce sont les chimistes cantonaux qui sont chargés de mettre en œuvre des mesures de contrôle. Est-ce qu’ils en ont les moyens ? Des contrôles après la mise sur le marché ne peuvent en aucun cas remplacer des contrôles et des interdictions avant la mise sur le marché de ces produits, mais sur ce point le Conseil fédéral a clairement « oublié » de répondre. Par ailleurs qui surveille le marché et signale aux chimistes cantonaux quand ils doivent intervenir ? Pourquoi par ailleurs c’est aux chimistes cantonaux d’intervenir quand ces produits déclarent sur leurs emballages mêmes, de manière visible et évidente pour tout le monde, même directement sur les sites internet, qu’ils sont illégaux avec plus de 2ml de e-liquides ? Il n’y a aucune analyse chimique à faire, il faut simplement intervenir et forcer les vendeurs à les retirer de la vente. Renvoyer les responsabilités aux Cantons, sans même répondre entièrement aux questions posées, nous semble une manière bien cavalière de la part de la Confédération de ne pas assumer ses propres responsabilités.

Conclusion

Alors que plusieurs pays, dont la France, interdisent totalement les cigarettes électroniques jetables face aux énormes risques qu’elles représentent auprès des jeunes et de l’environnement, la Suisse permet allégrement leur vente, même de celles qui sont déjà illégales.

Une fois de plus nous demandons à la Confédération d’agir en urgence face à la déferlante des cigarettes électroniques jetables auprès des jeunes !

Une fois de plus nous nous attendons à ce que la Confédération ne fasse rien !

Luciano Ruggia, Directeur de AT Suisse, 15 mars 2024

[i] https://www.at-schweiz.ch/fr/news-media/news/einweg-e-zigaretten-entsprechen-nicht-den-geltenden-normen/

[ii] https://www.at-schweiz.ch/de/at-blog/

[iii] https://www.at-schweiz.ch/fr/news-media/news/schweiz-einweg-e-zigaretten-mit-illegalem-nikotingehalt/

[iv] https://www.galaxus.ch/de/page/das-waren-unsere-bestseller-im-jahr-2023-31363 (Eingesehen am 27.2.2024).

[v] Fehlmann Rielle L. 23.3879 Interpellation: Elektronische Einwegzigaretten mit illegalen Mengen an E-Liquids auf dem Schweizer Markt. Was gedenkt der Bundesrat zu unternehmen? 15. Juni 2023 (https://www.parlament.ch/de/ratsbetrieb/suche-curia-vista/geschaeft?AffairId=20233879)

[vi] https://www.at-schweiz.ch/fr/news-media/news/snus-verpackungen-verstossen-gegen-das-gesetz/

[vii] Fehlmann Rielle L. 22.3212 Interpellation: Verkauf von Snus-Produkten, die den gesetzlichen Vorschriften bezüglich Gesundheitsrisiken nicht entsprechen. 17. März 2022 (https://www.parlament.ch/de/ratsbetrieb/suche-curia-vista/geschaeft?AffairId=20223212).

[viii] Fehlmann Rielle L. 23.4514 Interpellation: Warnhinweise zu Snus. Warum akzeptiert der Bund Verstösse? 22. Dezember 2023 (https://www.parlament.ch/de/ratsbetrieb/suche-curia-vista/geschaeft?AffairId=20234514).

[ix] https://www.at-schweiz.ch/fr/news-media/news/die-eidgenossischen-wahlen-2023-und-das-geld-von-philip-morris/

[x] https://www.swiss-tobacco.ch/ueber-uns/

[xi] RTS Radio Télévision Suisse, «Temps présent», 8. Februar 2024: https://www.rts.ch/play/tv/temps-present/video/les-nouveaux-pieges-de-lindustrie-de-la-nicotine?urn=urn:rts:video:14688268. Aussagen von Nationalrat Damian Müller bei Minute 45.

[xii] https://www.at-schweiz.ch/fr/news-media/news/umsetzung-der-volksinitiative-kinder-ohne-tabak-in-gefahr/

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